"Superstition". "Ruffled shirts". "Midnight hour". "Arpège". "Rival". "Cherub's smile". "Lovely senorita". "Lemon brocade". "Hocus Pocus". "Bord de mer". "Eau piquante". "Leda's lover". "Petit nuage". "Euphorie"….
Les délires de jaunes, oranges, violet foncé, mauve, bleu nuit, bleu lavande, chocolat, caramel, bordeaux, ivoire, blanc nacré, bleu roi.
Et puis le parfum. Des effluves poudrées, entêtantes, envoutantes. Ça sent le gâteau, la vanille, la frangipane, le pamplemousse. Ça évoque des parfums plus troubles, plus sensuels….
L'iris.
La fleur royale par excellence. Celle qui a inspiré la fleur de lys des rois de France, celle que l'on trouve dans les fresques du Palais de Cnossos en Crète depuis la plus haute antiquité existe en plus de 950 espèces toutes plus inouïes les unes que les autres..
Il y a à Paris un endroit où on peut aller les regarder, les admirer, les respirer. C'est au Jardin des Plantes, créé par Buffon, le passionné des espèces végétales et animales, que se trouve ce petit coin délicieux et unique. Juste derrière un de plus jolis manèges de la capitale, avec ses animaux fantastiques. Parmi eux, un dodo, ce gros oiseau comique, espèce disparue que l'on croise dans "Alice au Pays des merveilles" et dans "l'Age de glace" et dont un spécimen en plâtre est exposé à quelques pas de là, dans le très beau Musée d'Histoire Naturelle.
Derrière ce joli manège poétique aux animaux imaginaires ou disparus qui tournent en rond, chevauchés par des enfants heureux, il y a donc un petit coin de jardin paradisiaque où des merveilles de couleurs et d'odeurs vénéneuses s'épanouissent.
Le jardin d'iris du Jardin des Plantes.
Qui ouvre à nouveau sa petite porte en fer aux visiteurs. A mon grand désespoir, pendant quelques années, il était fermé, traumatisé par quelques vandales qui l'avaient violé, abimé. Il est à nouveau ouvert et c'est LE moment d' y aller.
Des iris en veux tu en voilà! Sur leurs grandes tiges rigides, ces grosses fleurs aux pétales charnus, aux couleurs criardes ou subtiles, aux parfums tellement particuliers s'offrent au visiteur. Sensuelles, délirantes, extravagantes, baroques, Tim Burtonniennes.
L'iris dont le nom vient du grec iridos et qui a longtemps signifié arc en ciel, à cause de ses teintes irisées.
Des siècles après Catherine de Médicis qui la première s'en serait servie pour se parfumer, Serge Lutens, le plus grand artiste parfumeur, a créé un jus extraordinaire autour de la fleur, "Iris silver mist", Prada sort son "Infusion d'iris" et Arthur H dans sa chanson "L'amoureux" avoue aimer, entre autres, les iris.
Et ce n'est pas pour rien que Van Gogh les a peints avec passion, tortueux et indomptables, ni que Monet les a plantés à profusion à Giverny.
Les plus grands philosophes, les plus grands poètes ont consacré des années de leur vie à planter, biner, tailler, arroser, désherber, bouturer. L'horticulture est une passion qui traverse toutes les couches sociales. Du prolo avec son pot de géraniums au balcon, à l'esthète qui bichonne ses plantes rares à Tanger, tous n'aiment rien tant qu'observer, entretenir ces trésors de grâce et de poésie pure que sont les fleurs.
Là, les mains dans la terre, loin de l'humanité décevante, à l'abri des trahisons, de la vulgarité ambiante et des intérêts médiocres qui nous abiment, le misanthrope se fait du bien à l'âme.
Il faut vite aller au Jardin des Plantes. La grâce et la beauté des iris est comme l'existence, sublime, éphémère et fragile.
Et pour finir, un des bons mots de Dorothy Parker "You can lead a whore to culture but you can't make her think". A lire à voix haute avec l'accent new yorkais. Comprenne qui pourra....
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