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dimanche 30 mai 2010

FRANÇOIS, FREDO ET MOI!




Gainsbourg avait beau dire, sans doute par dandysme allié à un regret éternel d'être passé à côté de la peinture, que la chanson était un art mineur, c'est tout de même la forme artistique qui traverse le plus de couches sociales, d'âges, voire de pays, et qui dissout gaiement la barrière des langues. Ça n'est pas rien. Etant une artiste qui a commis un tube (non? si.), quasi planétaire par dessus le marché, j'ai donc été invitée à l'Elysée avec quelques collègues, pousseurs de chansonnette. C'était le règne de Mitterrand, François. Et si j'étais là, à l'Elysée, il n'y était pas étranger. Comme chacun sait, c'est pendant son premier mandat, à F M (comme la bande!) que les radios libres ont vu le jour. Certes, la période n'a pas duré longtemps, mais elle a eu le mérite de balancer ce qui fait la joie et le fonds de commerce de nombreuses radios encore aujourd'hui. Les disques d'or d'hier étant les "gold" d'aujourd'hui.


Un Mitterrand, j'en avais déjà connu un, quelques quinze ans plus tôt. Frédéric, qu'il s'appelait. Le neveu de celui que la France entière allait appeler Tonton. Il était prof à l'Ecole Active Bilingue, là où j'ai atterri au retour de mon enfance new yorkaise. Là où j'allais à l'école quand mai 68 a lancé ses pavés dans la marre. Il était prof de politique pour les 4èmes et d'économie pour les 3èmes. J'étais en 4ème. Je l'adorais. C'était réciproque. J'étais sa chouchoutte, ma mère était au PSU, je lisais le Monde tous les jours, j'étais politisée… Those were the days… Ses cours étaient passionnants. "La presse", "La dictature"… Des grands sujets traités avec enthousiasme et talent. Juste, fallait pas l'énerver, le Fredo. Sans quoi il vidait sa boite de craies contre le mur du fond, et fallait qu'on plonge sous la table pour ne pas s'en prendre une, de craie, dans la tronche.


Donc, me voilà invitée à l'Elysée, chez son oncle! Ma chanson cartonne. Après avoir été imposée par Pierre Lattés sur Fun, une radio libre, elle passe maintenant partout, et il m'arrive de me retrouver sur les trois chaines en même temps. Les trois chaines!!! Dingue, non? L'impression que c'était hier, et ces trois mots, "les trois chaines" donnent l'idée du gouffre qui nous sépare de cette époque pas si lointaine. Je suis donc sur un petit nuage cotonneux. Invincible, euphorique, joyeuse, que je suis. Et gonflée aussi. Il faut dire que je n'ai jamais eu ma langue dans ma poche, et le sens de la provocation a toujours été mon luxe et mon péché mignon.

C'est donc pétée (de rire) et chantant "c'est la ouate" à tue tête que je pénètre dans l'Elysée, mon maxi à la main. On me convoque pour savoir si je veux bien soutenir Tonton pour sa campagne de 1988. Histoire qu'il remette le couvert. Evidemment, je suis partante! Je laisse mon disque dédicacé "de toutes les manières, c'est Tonton que j'préfère!" et me dis que ça, c'est une bonne accroche pour sa campagne! Presque aussi bien que "la force tranquille" de son gars, là!

Et v'la t y pas que je chante dans un meeting, et qu'il dit chez Mourousi (qui a du faire partie de ceux qui croyaient que le refrain était une ode à la blanche, lui qui ne crachait pas dessus) qu'une de ses chansons préférées c'est "la ouate"….

Et que le tonton de Fredo, il re-gagne et que pour fêter ça, je me retrouve invitée à manger à l'Elysée. Ça, c'est de la promotion! Ça change de la promo. Qui non seulement, lave plus blanc, mais rince!


Donc, l'Elysée. En bas des Champs, le Palais. Des messieurs compassés nous font passer, puis patienter dans les petits salons tout couverts de stuc et d'or.

On poireaute, un peu fébriles. Le soleil tape sur les dorures et l'attente sur nos nerfs. Va falloir être brillant, et la barre est haute. C'est pas gagné. On a fait TV6. On n'a pas fait l'ENA, nous. Enfin, on nous invite à passer à table. Attali accompagne le Président. Mes collègues sont au Top! France Gall, Berger, Marc Lavoine, Jane Birkin, qui a du emprunter une veste à la boutique Saint Laurent en face afin de pouvoir entrer au Palais (plus chic, tu meurs).

Je fais l'andouille. "Comment on s'assoit? Un garçon, une fille, un garçon une fille?"

Je me retrouve à gauche de Mon Oncle et à droite de Jacques Attali dans cette salle à manger en plexi seventies qui date de Pompidou. Il y a peu de choses qui vieillissent aussi mal que le plastique. Après les ors de la République, le plexiglass fait grise mine. C'est moche.


Presque autant que ce qu'on nous sert à manger. Du blanc de poulet sur lequel a été posé un escargot cuit. Sans sauce. A sec. Vous avez déjà vu un escargot cuit tout nu? Il y a peu de choses qui ressemblent autant à une crotte de caniche. On dirait un mini étron. On est bien loin des créations culinaires qui allient le goût aux couleurs et aux formes avec épices savamment saupoudrées sur l'assiette ou coulis au tracé inspiré qui font de votre assiette un Pollock coloré et délicieux. C'est moche. C'est sec. Et c'est pas délicieux. N'est pas Divine qui veut. là

Alors que, consternée, je regarde mon assiette, celle de Tonton arrive sur la table. Lui, il a une jolie préparation avec du vert, du rouge, des herbes… Enfin, c'est appétissant, quoi! Comme je ne doute de rien, j'ose: "Pourquoi il mange pas comme nous, le monsieur?" A quoi on me répond d'un air pénétré "Il a un régime spécial". Ah, d'accord! Ben il en a de la chance. Je changerais bien ma gueule de bois contre son cholestérol et mon assiette contre la sienne. C'est mieux d'être Président que d'être vedette du Top 50. Ne serais ce qu'au niveau culinaire….


Y'a pas à dire, il dégage, Tonton. La fonction auréole d'une aura certaine. On est un peu intimidés, c'est notre Président tout de même, le monsieur qui mange des plus jolies choses que nous. Ça papote gentiment. Tout le monde essaye d'avoir l'air intelligent et de dire des choses intéressantes. Pas évident. Certains sont ostensiblement lèche culs. Rien de nouveau sous le soleil, ni sous les plafonds dorés de l'Elysée. Tonton et Jacques Attali ont l'air de trouver ça sympa, ce dej'. Ils se lancent des regards complices en évoquant "Etienne" de Guesh Patti. A les voir, on dirait qu'ils ont bien percuté aux sous entendus érotiques de la chanson, et même que ça les émoustille, ces vieux cochons. Faut dire que les empereurs, les rois, les présidents, ça a toujours bien aimé les chanteuses….


On prend le café dehors, sur la terrasse. IL met son chapeau. C'est Motsch? A nos pieds, le parc. Il fait beau. Des fleurs, des arbres. J'adore les fleurs. Leurs couleurs lumineuses et infiniment variées, leur fragilité, leur beauté éphémère. Tonton, lui, est plutôt branché arbres. C'est qu'un arbre ça se fait sur des centaines d'années. Un arbre, c'est pas un truc de gonzesse. Encore moins un truc de tante. Un arbre c'est fort, c'est grand. C'est ça qu'est beau. Comme l'antique. Ça dure. Ça perdure. Par delà la vie des hommes. Il y a des arbres qui ont connu Victor Hugo, madame… Le Temps, avec un grand T. L'Histoire, avec un grand H. IL s'identifie. Tu seras un Arbre, mon grand…


Allez, je vous dis tout, mais vous l'répétez pas. A l'époque, j'étais plus portée sur l'herbe, ou alors le H, oui, mais sans le côté historique. Pétard avec un grand philtre. Le carton d'invitation de l'Elysée, trop classe, me fera d'admirables filtres à pétards! On est chic ou on ne l'est pas, darling!



6 commentaires:

  1. ouaaaaa la classe Caroline à l'Elysée !!! Superbe article passionnant !! Et meme devant le chef d'état Caroline reste ( deja ) la meme !!
    Trop drole le coup de l'escargot tout nu !!! ha ha ha ha
    Si t'en a encore des comme ca, vas y balance !!
    Gros bisous Caroline

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  2. super billet !! bravo Caro (moi c'est Caro que j'prefere), bon celle là a du faire le tour de Paris !
    quant à ce clébard de courbet, juste bon à lécher des vieilles bottes, ou des vieux culs ! Chais pas pourquoi mais quand je vois sa bobine j'ai vraiment l'impression de voir un merdeux ka pas grandi !

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  3. Je découvre ce blog aujourd'hui et je sais que ma journée de travail est foutue.

    Tant mieux..

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  4. Et ben moi je dis, le courbêêêê il ne sert pas si à rien que ça finalement. ça sent le carton plein c't'histoire ! Dire que j'ai failli finir ma semaine à bailler devant des blogs tricot... Parce que le mini étron à l'Elysée, moi je vote oui direct ! Même sans sauce. Et si c'est tout comme ça, tu parles que je m'abonne ! Par contre, c'est quoi ce truc à la con qu'il faut sélectionner pour commenter ?

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  5. Je découvre le blog d'une nana positivement déjantée mais toujours avec grande classe et grands écarts culturel, preuve d'ouverture et sagesse d'esprit. I love it :)

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  6. C'est à vous dégoûter de soaker les balls du Président de la République. C'était la mode : épaules de déménageur et gastronomie minimaliste. Un morceau de foie gras cuit dans un bouillon chez Lucas Carton. Ecoeurant et mou. Ça m'avait marqué, d'autant que je me faisais une petite fête de ce dîner.

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